Colloque du 5 mai : ce qui a été dit
07 mai 2009 - Le colloque du 5 mai dernier qui s’est tenu à la Maison de la Chimie a réuni un grand nombre d’acteurs du jeu français. Tous étaient là pour faire entendre leur voix auprès des parlementaires présents, et pour influencer le débat sur la prochaine ouverture du marché du jeu en ligne.
Ce qui est principalement ressorti, c’est la profonde division entre les politiques et les membres du secteur. Les premiers restent, en majorité, partisans d’une ouverture extrêmement régulée afin de protéger les citoyens et de diminuer le plus possible les risques d’addiction. Les seconds, quant à eux, laissent entendre que les conditions posées seraient un frein à la croissance du marché et qu’il ne serait pas viable très longtemps.
En effet, toute une série de mesures ont été inscrites dans le projet de loi, afin d’éviter que l’ouverture n’aille de pair avec une augmentation du pourcentage de joueurs compulsifs. Premièrement, seuls le poker et les paris sportifs pourront être proposés, les jeux de type “casino” seront interdits. Les opérateurs font eux remarquer un fait indéniable: c’est le secteur “casino” qui est le plus rentable et profitable, et le projet de loi est déjà en train de les pénaliser.
Deuxièmement, le taux de redistribution au joueur (TRJ) a été plafonné entre 80% et 85%, également pour éviter l’addiction. Des gains trop fréquents, même si le solde final est négatif, font en effet croire au joueur qu’il est gagnant. Or, rétorquent les opérateurs, la plupart des sites déjà existants (à l’étranger ou illégament en France) offrent des taux de redistribution de 95% voir plus (jusqu’à 98%), bien plus alléchants pour les nouveaux joueurs; la concurrence sera donc intenable.
Autre sujet brûlant, la fiscalité… Pour les uns, c’est un minimum, pour les autres, c’est beaucoup trop. De plus, tout chiffre mis à part, les opérateurs sont plutôt pour une imposition sur le produit brut des jeux et non sur le chiffre d’affaires.
Bref, dans ces trois cas, les opérateurs tonnent que ce projet de loi irréaliste et inadapté aux réalités du marché ne leur permettra pas de décoller, et avancent même la possibilité que les joueurs français continueront de s’adresser aux sites étrangers “illégaux” non licenciés en France, beaucoup plus attirants pour eux. De ce fait, la légalisation du jeu en ligne serait un leurre, et finalement seuls les deux ex-monopoles (la FDJ et le PMU) arriveraient à s’imposer.
De leur côté, les législateurs et les représentants des associations de protection des joueurs et de prévention des addictions restent clairs: la dépendance au jeu a augmenté dramatiquement au cours des dernières années (ils ne précisent toutefois pas d’où ils tirent leurs chiffres) et il faut à tout prix protéger les citoyens français. Pas question de vendre leur santé aux opérateurs!
Mais tout de même, au final, la loi pourrait concilier un maximum de parties. Les législateurs admettent que, pour beaucoup, ce secteur est tout à fait nouveau pour eux, et qu’ils manquent cruellement d’expérience pour en comprendre les clefs et les enjeux. Le député Jacques Myard a également affirmé que cette ouverture était complexe, et qu’elle nécessitait un projet de loi complexe, complété au fur et à mesure de l’apparition de nouveaux problèmes et suite à des discussions avec les différents acteurs. En ce sens, le colloque du 5 mai n’aura pas été vain, car les membres de l’industrie ont pu se faire entendre. M. Myard sous-entend également que cette loi pourra être modifiée par la suite, si elle est effectivement trop éloignée des réalités économiques.
En conclusion, il faut saluer l’effort de toutes les parties qui se sont jetées corps et âme dans ce projet, en partant de rien. Reste à voir si, d’ici quelques mois, la loi pourra allier protection du citoyen et performance économique. Tout en espérant que la législation n’arrive pas avec un train de retard, déjà dépassée par de nouvelles réalités technologiques montantes qu’elle n’a pas prises en compte…